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Anne-Marie Pinard

Entre 20 à 25 % de la population canadienne vit avec une douleur chronique, c’est-à-dire une douleur qui dure plus de trois mois. Souvent, les patients se trouvent démunis face à cet état qui peut avoir de nombreuses causes : accident, fibromyalgie, migraine à répétition. Depuis deux ans, ces patients, leurs proches, mais aussi les professionnels de la santé peuvent se tourner vers le site Web Gérer ma douleur.

L’idée de ce site est venue de deux sources, explique Anne-Marie Pinard, professeure titulaire au Département d'anesthésiologie et soins intensifs de la Faculté de médecine de l’Université Laval, titulaire de la Chaire de leadership en enseignement sur la douleur chronique - MÉDISCA et anesthésiologiste au Centre d'expertise en gestion de la douleur chronique au Chu de Québec-Université Laval. «Cela fait très longtemps qu’on remarque que les patients qui nous arrivent savent très peu de choses sur la douleur chronique, explique l’experte. Les professionnels de première ligne, médecins de famille, physiothérapeutes ou encore psychologues, ne sont pas des spécialistes de la douleur chronique. L’idée n’est surtout pas de leur lancer des roches, car leur formation ne comprend que très peu d’heures sur le sujet.  La douleur chronique n’est alors pas très discutée entre le patient et eux parce qu’elle n’appartient à aucun domaine spécifique. Il faut donc former et informer les professionnels de première ligne.»

Pour avoir donner des formations, Anne-Marie Pinard sait que les professionnels de la santé n’ont pas une demi-journée à consacrer à une formation, d’où l’idée d’offrir des capsules de 15 minutes abordant différentes facettes du sujet. De cette réflexion est née la Chaire de leadership en enseignement sur la douleur chronique dont elle est titulaire.

Le site Gérer ma douleur comprend également un volet pour les patients, né un peu plus tardivement dans la réflexion de la médecin. «Les gens arrivent chez nous avec des recherches qu’ils ont faites sur Google, souligne-t-elle. Et c’est normal! Quand on a mal, on cherche des solutions, mais on trouve de tout sur Internet, de bonnes choses, mais aussi n’importe quoi. Nous avons donc fait “un scan” de tous les sites Web des organismes à but non lucratif en santé, des bannières pharmaceutiques et des ordres professionnels en santé.» Dans cette revue des publications, trois critères primaient : Qui est la personne qui a écrit l’information? Quand l’a-t-elle fait? Et, quelles sont les références scientifiques?

Finalement, ce sont les sites qui présentaient au moins deux de ces trois critères qui ont été retenus. Puis des professionnels ont révisé l’information qui se trouvait sur ces sites pour la valider, ne retenant que ceux qui passaient ce deuxième test. «Nous avons récolté 4000 références et nous en avons retenu 200, c’est dire la qualité de ce qui se trouve en référence», souligne Anne-Marie Pinard. Elle met en avant le soutien que le projet a retenu du Réseau québécois de recherche sur la douleur.

Le site Gérer ma douleur compte aussi la section Agir pour moi, qui a été réalisée par Pascale Marier-Deschênes, qui a soutenu avec brio sa thèse de doctorat récemment. Cette section se veut un programme d’autogestion de la douleur qui propose les meilleures pratiques et qui a été conçue en co-construction avec sept personnes vivant avec une douleur chronique. «Nous voulions des ressources, mais aussi un programme d’autogestion conçu pour toute personne francophone, et même anglophone, puisque certaines ressources sont en anglais, qui cherche de l’information sur la douleur chronique. Nous avons choisi de mettre de l’avant la notion de prise en charge par le patient, parce que les professionnels de la santé ne sont pas des garages qui réparent les gens. Le sujet s’avère très peu exploité, ou je dirais plutôt expliqué tardivement. Les gens ont aussi leur part à faire et nous voulions leur donner des stratégies autres que la médication ou la physiothérapie. En plus, cela permet d’éviter les listes d’attente du système de santé.» Elle suggère évidemment à ses patients d’aller y faire un tour avant un rendez-vous.

Si le site a été mis en ligne il y a deux ans, l’équipe a commencé à en faire la promotion en 2022, au début du mois de novembre pendant la Semaine nationale de la sensibilisation à la douleur chronique. «Nous avons reçu énormément de témoignages tant des patients que des professionnels de la santé. En septembre 2023, 32 000 personnes ont visité le site et, aujourd'hui, 1600 personnes s’y sont inscrites en tant que patients», conclut Anne-Marie Pinard.

À noter, le site est entièrement gratuit pour les professionnels de la santé membres d’un ordre professionnel et pour les patients.